Une fois n’est pas coutume, quittons l’Ecosse à bord de BradPeat et traversons la mer d’Irlande pour nous rendre dans l’ile au trèfle.
Nous allons goûter à ce qui pourrait s’assimiler au whiskey « presque originel » produit par les alambics de Saint Patrick. Aujourd’hui ce sera WRITERS’ TEARS COPPER POT : DEAU COGNAC FINISH.
Nous accostons dans le port de Dublin mais nous n’y ferons qu’un passage, pas le temps d’aller sur l’ile de Lambay, ni de boire une pinte au Celt (terrains d’anciennes aventures). Nous prenons la route vers le sud en direction de Kilkenny.
J’ai rendez-vous avec un certain Risterd Mac Raganaill à proximité de la ville de Carlow. Il ne m’a pas donné rendez-vous au siège de la société Walsh Whiskey's mais au Browsnshill Dolmen à l’extérieur de la ville.
Nous sommes en fin d’après-midi et déjà le soleil décline quand nous arrivons sur place avec mon fidèle destrier. Le lieu n’est pas accessible par la route aussi c’est avec grand regret que je dois l’abandonner sur le parking pour touristes ! Le chemin qui me conduit sur le lieu du rendez-vous n’est pas très long mais suffisamment pour qu’à mon arrivée sur place la nuit commence à pointer son nez et donne au lieu un côté mystique.
Risterd m’attendait devant le grand dolmen avec une bouteille de forme allongée à la main.
« Dia duit, conas atá tú » me dit-il pour me souhaiter la bienvenue.
Il me dit qu’avant de me parler et déguster ce whiskey, il doit me parler du lieu où nous nous trouvons. Il me raconte que selon la légende (un peu arrangée par votre serviteur quand même), c’est sur cette pierre que se trouvait Maewyn Succat (plus connu sous le nom de Saint Patrick) pour annoncer au peuple irlandais qu’il venait de bouter tous les serpents de l’ile et qu’il allait désormais vivre en paix (chrétienne). Il me dit aussi que désormais, le peuples serait sous la protection de la sainte trinité (représentée sous la forme de trois feuilles de trèfle !).
Enfin, et là on atteint le mythe mais je me demande si c’est bien la vérité, il me raconte qu’il aurait frappé la pierre du dolmen avec sa férule et que ce dernier aurait ruisselé d’un liquide couleur or appelé usci bethad.
Risterd me regarde pour voir ma réaction et se met à rire ! Il me dit que la réalité est que Saint Patrick aurait été le premier à ramener des alambics des pays arabes et serait à la base des premiers distillats irlandais (vous savez la vieille lutte entre les deux frères ennemis écossais et irlandais qui se battent la genèse du whisky avec ou sans « e »).
Alors que la nuit est désormais tombée et que je comprends mieux pourquoi il a voulu que l’on se retrouve ici, un halo bleu se met à enserrer le dolmen et je m’attends à tout moment qu’un leprechaun sorte de sous une pierre.
Mon hôte me dit que le moment est venu de goûter ce fameux usci bethad (mieux connu sous le nom de whiskey désormais). Pour se faire, il sort sa bouteille de WRITER’S TEARS COPPER POT dans laquelle étincelle un liquide d’une belle couleur or profond (on dirait du miel translucide).
Il m’explique le choix de cette cuvée. Bernard Walsh (propriétaire avec sa femme Rosemary de Walsh Whiskey's) est un passionné qui a souhaité produire un whiskey sur la base de vieilles recettes ancestrales : un savant mélange entre un single malt (100 % orge maltée) et un pot still (40 % orge maltée et 60 % orge non maltée), le tout passé sous les griffes de la triple distillation bien entendu !
A noter que la société Walsh whiskey’s a également à son tableau de chasse le single malt IRISHMAN (dont nous avions gouté la version 17 ans single cask à bord du Wild Atlantic Bus non loin de Galway) et qui traine souvent avec les podiums mondiaux de whiskey. De plus les deux propriétaires de la distillerie souhaitaient rendre hommage aux écrivains irlandais du début du XXème siècle qui aimaient à se réfugier avec un bon verre de whiskey pendant leurs longues heures d’écritures.
Risterd me dit enfin que sachant qu’il savait que son invité du jour était Français, il avait choisi de faire déguster la série limitée vieillie en fût de Cognac (série limitée qui se décline aussi en Red Head –Xéres- et en Brut de fût).
Justement qu’en est il de ces fûts de Cognac retenus pour le 9 mois de finish de ce whiskey tout d’abord élevé en fûts américains de Bourbon ? Ils ont été fabriqués par la maison Allary et ont contenus pendant 10 à 15 ans (XO) du cognac de la maison DEAU.
Quand est-il donc ?
Au moment où il plonge dans le verre, il se love dans des arômes moelleux qui n’ont clairement rien à voir avec les standards irlandais. Il va détecter la chaleur des arômes de raisins secs et de chocolats. Pour autant les 46 % du distillat, lui donne un arôme médicinal. Quand le nez retourne dans le verre les arômes restent chauds et très sucrés. On ressent l’odeur d’une poire bien mûre que l’on aurait trempé dans un vin (français bien entendu) chaud. C’est au troisième passage qu’on retrouve enfin le résultat de l’accord entre l’Irlande et la France. Une odeur d’agrume et les aromes du cognac sur la fin.
Risterd me lance un « Slàinte » qui donne le signal de la dégustation.
Quand il entre en bouche c’est comme si vous veniez de croquer un pim’s chaud. Il est moelleux avec un arome de chocolat noir. Au bout de quelques secondes on ressent même un peu l’amertume du chocolat noir. Mais au bout de quelques secondes, comme avec un pim’s après le chocolat arrive la chaleur de l’orange confite. Arrive ensuite une pointe de poivre fugace avant le retour du moelleux du pim’s. La fin de la dégustation est annoncée par l’amertume vineuse du fût de cognac.
Une fois le pim’s (heu pardon, le whiskey) avalé, il laisse un souvenir floral, léger et paradoxalement frais. On peut ressentir çà et là de souvenirs de chocolats noir.
Le verre vide montre bien que ce distillat est fabriqué à partir d’orge car c’est son odeur maltée laisse un beau souvenir.
Avec ce whiskey on est assez loin des standards irlandais comme quoi les recettes anciennes du usci bethad de Saint Patrick étaient différentes de celles du whiskey.
Au moment où je m’apprêtais à remercier mon hôte pour ce voyage gustatif dans le temps, je me rendis compte qu’il avait disparu. Seul au loin dans la brume de la nuit irlandaise, j’aperçu un feu follet se glisser sous une pierre ! Mais qui était vraiment ce Risterd Mac Raganaill ?
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