DISTILLERIE KYRÖ - DEGUSTATION KYRÖMALT, KYRÖMALT OLOROSO, KYRÖ WOODSMOKE et KYRÖ PEATSMOKE

Ni une, ni deux, je contacte Nicolas de DISTILL SPIRIT (qui distribue les ryes finlandais de KYRÖ en France)  pour savoir comment on peut atteindre les hautes terres du nord et découvrir Kyrö.

Me voici donc parti à bord de BRAD PEAT vers de nouvelles aventures en pays viking ! Direction le sud-ouest de la Finlande pour le village d’Isokyrö.

Rendez-vous est pris avec KALLE VALKONEN chef distillateur. Et comme le finlandais ne semble pas répondre aux us et coutumes, il m’a donné rendez-vous dans un des nombreux saunas du coin ? Pourquoi pas, j’ai déjà rencontré un de ses collègues scandinaves dans une boucherie (voir ici la dégustation STAUNING) alors….plus rien ne m’étonne.

Juste avant d’arriver au village, je parcours la campagne de la région agricole d'Ostrobotnie du Sud et les grandes étendues de céréales. A mon grand étonnement, au loin j’ai cru voir des hommes (qui semblaient nus) en train de courir dans un champ ! Etonnante comme coutume quand même ! Surtout que le fond de l’air était quand même assez frais et que ça coupe quand même les épis… Surprenant !

Je suis enfin arrivé au village d’Isokyrö en ne doutant pas une seconde avoir du mal à trouver un sauna (löyly en finlandais dans le coin) ! Et bien, que nenni ! En partant du principe qu’en Finlande il y a 3,3 millions de saunas dans un pays de 5,5 millions d’habitants…c’était comme chercher une aiguille dans un ballot de seigle !!

Heureusement, quand j’ai annoncé ma destination et dit le nom de la personne que je devais rencontrer, on m’indiqua celui vers lequel je devais me rendre.

J’ai eu chaud, mais ce n’était rien par rapport à ce qui m’attendait.

C’est ainsi, au chaud, dans un sauna à fumée que j’ai fait la connaissance de Kalle et des ses moustaches, un verre de GIN KYRÖ à la main ! 

De suite, je lui ai fait part de ma rencontre dans les champs. Cela ne l’a pas étonné le moins du monde. Il m’a expliqué qu’ici, les hommes aimaient faire corps avec la matière première. Et que les personnes que j’avais vu n’étaient ni plus ni moins qu’une partie des employés de la distillerie en train de se mettre en condition dans un champ de seigle, avant le lancement de la campagne de distillation du Gin !

Je sens que cette distillerie va me plaire !

C’est dans la « douce » chaleur de ce sauna, que j’ai compris, en écoutant les explications de Kalle, ce que je faisais ici.

Il m’explique en effet que c’était ici même que l’aventure KYRÖ avait débuté lors d’une soirée entre amis comme seul la Finlande peut en proposer. Un verre de whisky en main, une question a été lancée par l’un d’eux : pourquoi ne pas distiller du whisky en Finlande ? Il le fallait typique du coin, aussi, c’est en toute logique que l’aventure allait utiliser la matière première locale : le seigle ! Kalle ne pas dit en revanche si c’était du whisky qui était jeté ce soir là sur les pierres chaudes. Il m’a en revanche dit que l’idée avait fait son chemin dans la tête des 5 protagonistes et qu’elle avait débouché sur l’aventure KYRÖ.

Alors que la température approchait des 80 degrés, Kalle m'a raconté qu’ensuite il a profité de l’absence de ses parents pour transformer leur maison en brasserie (grains de seigle et odeur comprise). Faites-moi penser à bien briefer mon fils quand je partirai en vacances !! 

Le problème était qu’il n’y avait pas d’alambic dans la maison familiale. Il a fallu faire 3 heures de route vers le sud du pays et la ville de Pori, chez BEERHUNTERS, avec le mash dans le coffre, pour trouver du matériel de distillation.

Le fait est que les premières gouttes de Rye de KYRÖ venaient de couler. 

On peut imaginer que les premières dégustations aient eu lieu dans le sauna d’origine. Néanmoins il a fallu le bagou et l’opportunisme des associés pour faire découvrir leur breuvage en le dispensant clandestinement au Whiskey Show de Londres. Les retours semblaient concluants.

L’aventure pouvait continuer.

Le problème c’est que d’une part, les parents de Kalle sont rentrés, et surtout qu’ils n’allaient pas faire 200 km à chaque distillation ! Ce n’est pas complètement eco-friendly ! Aussi, les amis se sont mis en quête d’un local pour héberger leur distillerie. Et ils sont « tombés par hasard » ), sur une vieille laiterie inutilisée et transformée en garage auto.

Kalle me dit que c’est comme cela que la distillerie KYRÖ était née en 3 mois.

Alors que la chaleur devenait vraiment intenable pour un pauvre français comme moi, il me dit qu’il fallait faire connaitre la production et que les premiers verres ont été servis à « l'Agence touristique d'Isokyrö », un bar clandestin éphémère à Helsinki.

Il fallait qu’on sorte de cette fournaise ! Aussi, KALLE ayant pitié de moi, nous sommes partis en direction de la fameuse laiterie.

Nous sommes arrivés dans un ensemble de bâtiments à la sortie du village sur les rives de la rivière Reinil änkoski. Au vue de ce que m’avait dit Kalle, je m’attendais à de l’artisanal, aussi, je fus bien surpris en voyant tous les bâtiments qui composaient les lieux. Il s’était passé des choses depuis 2014 !!

Il m’a effectivement montré l’ancienne laiterie en grosse pierres grises sur le coté de laquelle on pouvait voir une tour surmonté d’un toit pagode à la finlandaise ! Et c’est bien là que Kalle m’a montré les deux alambics à l’origine de l’aventure du Rye finlandais.

Il m’explique que depuis 2016, c’est dans ce bâtiment qu’est réalisé la seconde production de KYRÖ : le gin. Il en profite pour me dire qu’à la base, la production réalisée à partir de seigle et de plantes sauvages locales (feuilles de bouleau et de reine des prés) prévue pour proposer une production durant les premières années de vieillissement de leur whisky, a dépassé toutes les espérances ! En effet, le Kyrö Gin a été élu meilleur gin au monde pour Gin & Tonic par l'IWSC en 2015. Rien que ca ! Il est même désormais décliné en pink et en dark gin !

Mais pour parler whisky c’est surtout vers le grand bâtiment noir plus récent que nous nous dirigeons.

Une fois rentré dans le bâtiment, Kalle n’est pas peu fier de me faire visiter sa distillerie rutilante avec ses cuves de brassage et ses 8 cuves de fermentation. Mais surtout, il est encore plus fier quand nous entrons dans « son bureau » ou trônent deux magnifiques alambics Forsyth en cuivre et une colonne de rectification (uniquement utilisée pour le gin).

Il finit la visite par les entrepôts de stockage qui commencent à contenir un nombre significatif de fûts ! En chemin il est fier de me dire que de 5 personnes à l’origine, ce sont désormais plus de 50 personnes qui travaillent pour KYRÖ ! Une belle réussite.

C’est dans le premier chais de vieillissement, plus petit et remplis de futs peints (encore une spécificité de la maison) qu’il va me faire gouter les 4 productions du jour.  

Kalle a souhaité me présenter ce whisky en premier car il représente l’âme de KYRÖ. Distillé uniquement à partir de seigle de la région dans les deux pot stills de la maison, il est vieilli dans des fûts de chêne américain neufs et d'anciens fûts de bourbon. Brut !

Avant de me lancer il me dit que, comme l’intégralité de la production de la maison, il est proposé à 47,2 % d’alcool, sans filtration à froid.

Le liquide qui sort de la bouteille à l’étiquette blanche et qui coule dans mon verre est d’une couleur dorée assez marquée. 

Le premier passage du nez on le découvre sucré avec des notes de fruits secs (abricots et raisin) accompagnées assez rapidement de notes poivrées. On va ensuite lui découvrir une montée en puissance de notes d’herbes sèches rappelant qu’il s’agit d’un rye.  

Le second passage est plus sec sous la prédominance des notes céréalières de foins dans l’étable mais également une certaine douceur de vanille.

Troisième passage est encore plus « agricole » avec cette fois ci des arômes de céréales séchées au soleil scandinave.

En bouche, il est puissant et vif avec une certaine chaleur. Il dégage ensuite des notes de seigle assez nettes et des notes plutôt fleuries. Si le seigle reste prédominant, sur la longueur, il dégage des notes boisées presque vertes mais également des notes de vanille et des notes de poivre. Sur la fin de dégustation il révèle des notes de graines torréfiées sur un fond de miel.

Quand on l’avale, il va tout d’abord relâcher ses dernières notes de seigle avant d’avoir un final toute en fraicheur.

Le verre vide dégage une odeur de champs de seigle après la moisson, mélange de céréale et de terre.     

En prenant la seconde bouteille de rye (celle à l’étiquette bordeaux) Kalle, nous amène en Espagne avec un rye 100 % seigle finlandais mais vieilli successivement en fûts de sherry Oloroso, chêne américain neuf et ex-bourbon.

Il montre l’assez grande influence du bois sur les whiskies de seigle. Déjà la couleur du distillat se fonce et passe désormais à un or profond avec des reflets cuivrés. 

C’est au nez que l’impact du vieillissement  va être le plus marqué.

En effet, le passage en fut de sherry oloroso semble avoir calmé la furie du seigle. Au premier passage ainsi, on découvre des notes fruités plus douces et plus sucrées sur des agrumes et des fruits rouges. Pour autant, les épices arrivent assez rapidement sans agressivité.

Cependant on ne le refait pas et au second passage ce sont bien des notes de seigle qui reprennent le dessus et prédominent avec uen odeur de céréale marquée.

Le troisième passage va être plus boisé résineux sur des notes d’encaustique et de pin.

En bouche, il va tout d’abord délivrer des notes de cacahouètes, puis des notes de fruits rouges et enfin d’épices douces. Ensuite une nouvelle fois le seigle fait son apparition, mais là encore le passage en fût de sherry semble l’avoir adoucie. Sur la fin, il est même assez chaud et doux comme un caramel (dans lequel on aura cependant pas oublié de glisser quelques épices).

A la descente, il est rehaussé par des notes fraiches de réglisse      

Le verre vide va revenir sur le seigle (comme si ce dernier était resté tapis derrière tous ces arômes fruités et pouvait enfin se montrer).

La troisième bouteille que sort Kalle a une étiquette grise comme la fumée et un liquide de couleur cuivrée.

Il m’explique que la distillerie a voulu ici reprendre une technique traditionnelle finlandaise en maltant son seigle avec de la fumée de bois d’aulne dans une vieille grange comme il est de coutume de le faire pour le poisson et la viande !

Il m’explique qu’après avoir été distillé, le liquide a été élevé en fûts de bourbon, de chêne français et de chêne blanc américain neufs. 

Le premier passage du nez dans le verre assez doux sur la vanille et sur des notes de bois résineux brulé. On pourrait lui trouver des airs de sucre de bacon séché et quelques notes fruitées en arrière plan.

Le second passage va être plus conventionnel avec une odeur de seigle terreuse qui lui donne une certaine tension avec une montée en puissance des épices.

Le troisième passage montrera sur un fonds de fumée proche de la tourbe maritime, un positionnement sur des notes citronnées et médicinales.

En bouche c’est un mélange sucré-salé. La douceur d’un bonbon au miel et de grains de fleur de sel. On découvre ensuite des notes proches de celles d’un whisky tourbé avec des notes de bois calciné et d’épices douces au palais et marquées sur la langue. Il devient ensuite plus doux mais garde un fond médicinal.

À la descente c’est bien des notes de fumée qui reviennent en premier avant de laisser place à la fraicheur de la réglisse.

Le verre vide a une odeur de pomme de pins, de citron et d’encaustique.

Le dernier rye whisky que me présente Kalle sort lui d’une bouteille à l’étiquette verte (sur laquelle je lis un nom que j’aime bien PEATSMOKE) a lui une couleur entre le cuivre et le doré moins marquée que le précedent.

Kalle, m’explique que bien entendu il est obtenu avec du seigle 100 % finlandais malté dans la même grange que le WOOD SMOKE mais sur la base de pain de tourbe locale qui en brulant enfument les grains germés pendant 24 h.

Le liquide est ensuite glissé dans des fûts de chêne américain neufs, d’ex fûts de Bourbon de premier remplissage et quelques fûts Ex-Bourbon ayant déjà accueillis le Kyrö Malt.

Résultat ?

Au premier passage du nez, il est assez doux. C’est même peut-être le plus doux des 4 goûtés aujourd’hui. Il va dégager une odeur de céréales sucrées sur un fonds assez minéral. En insistant on lui découvre des épices qui viennent rehausser le tout.

Au second passage, il va aller à l’inverse du WOODSMOKE, car il va de suite montrer son caractère tourbé herbacé mais conserve des notes assez sucrées.

Au troisième passage il va rafraichir l’ambiance avec des notes citronnées et épicés.

C’est celui qui montrera le moins, au nez, les notes caractéristiques du seigle.

Si vous en glissé quelques gouttes dans la main, vous allez découvrir des notes céréalières très légèrement tourbées. 

En bouche, il est assez vif avec des notes boisées brulées plus marquées qu’on pourrait s’y attendre. Il a ensuite dégagé les notes céréalières du seigle restées discrètes nez accompagnées de pointe de poivre qui s’estompent assez rapidement pour laisser la place à du miel.

Au final, lorsqu’il est avalé il redevient plus minéral et frais sur des notes mentholée et végétales. Sur la durée il laissera de longues notes de réglisse.

Le verre vide relâchera un mélange de notes citronnées et légèrement fumées.

Une fois la dégustation terminée, Kalle me propose de goûter une création de la maison, la liqueur de whisky KYRÖ DAIRY CREAM composée de crème et de lait de la région. Néanmoins, il me dit que pour bien l’apprécier il faudrait retourner dans un sauna ! Mon corps de français tiendra-t-il le coup d’un second passage dans la fournaise….. ? Si j'en ressort je vous le dirai !