C’est à croire que tout se passe sur Skye en cette rentrée.
A peine avais-je quitté le ferry qui me ramenait de l’Ile de Raasay (où j’ai eu l’occasion de vous faire partager la naissance du premier whisky endémique –ici-), je reçois un message de John MACKINNON avec qui j’avais eu l’occasion de déguster le premier distillat de la nouvelle distillerie insulaire TORABHAIG (quand je vous dis qu’il y a de la nouveauté ici). Il me dit de profiter du passage pour faire un nouveau petit détour par ARAMADALE au sud-est de l’Ile et venir goûter le second whisky de la série LEGACY, le ALLT GLEANN.
Copyright Willie McPhelim
Me voici donc de retour au sud de l’ile de Skye. Je connaissais le planning de sortie de la gamme LEGACY (voir plus bas) mais je ne pensais pas revenir aussi rapidement au bord de Knock Bay (mais on va quand même pas se plaindre).
John MACKINNON est assis derrière la baie vitrée entre les deux principaux bâtiments de la distillerie (lien entre l’histoire de cette ferme distillerie et la modernité qui est la sienne désormais). Il est certainement en train préparer un nouveau distillat.
Ça sent toujours autant la tourbe dans le coin, un réel plaisir.
Il me fait signe et me rejoins devant les grandes lettres de TORABHAIG. Il a à la main une bouteille du nouveau ALLT GLEANN et m’accompagne juste à côté devant la roue à aubes car c’est là qu’il veut me faire goûter le whisky.
Curieux comme endroit.
Ce qu’il veut me montrer à cet endroit, c’est l’eau qui passe sous nos pieds et qui entraîne la roue. Un ruisseau d’eau pure filtrée par les roches des montagnes avoisinantes nommé Allt Gleann ! Ça ne vous rappelle pas quelque chose ? Il suffit de regarder la bouteille, c’est écrit dessus ! Tout s’éclaire. Le choix a ainsi été fait de rendre hommage à l’eau sans laquelle le distillat de TORABHAIG ne coulerait pas du condenseur !
Le voici le second opus du futur héritage de la nouvelle distillerie.
Déjà réglé comme une horloge malgré son jeune âge, la distillerie continue à nous « distiller » (sans jeux de mots) ses expériences. L’année passée le premier trois ans LEGACY 2017 (voir ici la dégustation), cette année le ALLT GLEANN, en 2024, le CNOC NA MOINE (rendant hommage au mont des highlands), en 2026, le ALLT BREACACH (seconde source d’approvisionnement en eau de la distillerie) et aboutir en 2028 sur un 10 ans prometteur. Que des petites pépites sorties à 30 fûts chacune.
Cessons de tergiverser plongeons dans la tourbe, car parole de PEATDREAM de tourbe il est ici question !
Nous avions déjà vibré en sentant le résultat de la distillation d’un malt fumée à 50 PPM pour le 2017, et là John me dit que les chevaux du fumoir à malt ont été lâché et que les orges Concerto et Lauréate ont pris 77 PPM de phénol.
On va parler d’un whisky tourbé je vous le dit !
Alors, alors… ???!!
Déjà, le distillat est ici dans sa couleur naturelle et va être dorée par ses années passées dans d’anciens fûts de bourbon et d’anciens fûts de whisky réhabilités (on ne connait pas son âge mais en toute logique on doit être sur 3 ou 4 ans-NDLR). Pas de chichi chez TORABHAIG, on veut montrer ce qu’on sait faire on expérimentera plus tard : tout à leur honneur !
Alors, il sent la tourbe ce whisky ?
Oh que oui !
De loin elle se distingue déjà avec une belle fraicheur maritime accompagnée de l’odeur du malt qui a capté les phénols.
En entrant franchement le nez dans le verre, elle confirme bien sa présence. Les effluves de fumée vont s’accompagner d’un mélange à la fois citronné et vanillé. On peut détecter une pointe de bâton de réglisse En persistant des notes poivrées s’échappent et viennent chatouiller les cils du nez.
Le second passage est plus chaud et doux. L’odeur de fumée est toujours là mais elle s’arrondi sur des notes d’agrumes plus sucrés qu’acide.
Le troisième passage continue son réchauffement et apporte des notes miellées, sucrées mais également épicées.
Au nez ce whisky va être comme le ressac de la mer dans le golfe de Knock bay. L’eau arrive et amène avec elle de la fraicheur et des embruns et quand elle repart, le sable se réchauffe au soleil et devient sec.
Dans le creux de la main, le distillat prend l’odeur du pneu et du tabac mais avec des airs peut-être un peu plus frais que sur d’autres whiskies tourbés.
Ah !! on en voulait de la tourbe et bien on en a. Et de manière plus marquée que sur le premier opus.
Avant tout appréciez l’impression d’avaler de la fumée au moment ou le liquide s'apprête à entrer en bouche.
A l’instar des annonces du nez, l’entrée en bouche va être fraiche. On va tout d’abord se faire peur avec une pointe d’amertume (certainement liée à sa jeunesse) mais qui va très vite laisser la place à des notes maritimes et citronnées.
Assez vite, il se fait plus moelleux et apporte un sac d’épices sur la langue. Ces notes vont disparaitre assez rapidement pour laisser plus de place à un arome tourbé et sa tension de fumée (dont les amateurs de tourbe se délecteront).
La suite de la dégustation va être plus moelleuse avec des arômes de vanille et de surprenantes pointes d’amande.
Alors que vous venez de l’avaler et que d’ultimes notes de citron et les derniers épices aient trainé la patte sur la langue, on va découvrir une finale assez longue avec des notes de réglisse et un long reste de fumée.
Une fois la dégustation terminée, je me prends à m’évader en regardant sous mes pieds l’eau sombre et pure et dans mon verre le liquide doré et je me dis que les connaissances des hommes font parfois de belles choses. Oui je sais ce que vous allez dire…46 % d’alcool de quoi rendre philosophe.
C’est ainsi que je prends congés de mon hôte et lui donne rendez-vous en 2024 pour le 3ème épisode.
En attendant, si vous ne pouvez pas attendre, quelque chose me dit qu’il pourrait bien y avoir du TORABHAIG à goûter au prochain whisky live de PARIS ce mois-ci !! A bon entendeur !