En revenant d’Ecosse (et d’Islay) où j’ai pu en partie assouvir mon envie de tourbe (voir dégustation Ardbeg Wee Beastie), je fais une pause en pays d’Auge.
On m’a parlé d’une version de whisky BELLEVOYE légèrement tourbée et vieillie en futs de Calvados : LE VERT !
Du coup je me suis dit comme c’est sur ma route vers le sud, avant de faire la dégustation d'un whisky vielli en fût de Calvados, je vais me renseigner sur celui-ci en m'intéressant notamment à une des plus grandes maisons de Calvados française : Calvados Christian Drouin.
Je fais donc une pause non loin de Pont l’Évêque et je découvre que cette maison renommée nichée dans son magnifique corps de ferme est un spécialiste du vieillissement du Calvados et en a même fait sa marque de fabrique. Imaginez dans son chai des fûts de calvados allant jusqu’aux années 40 !
Je me rends également rendu compte que cette maison de calvados aime faire des expériences de partage de fûts comme faire vieillir son distillat dans des fûts de Rhum jamaïcain (Hampden) ou de Whisky japonais (Mars et son single malt Komagatake que j’ai eu l’occasion de vous présenter il y a quelques temps si cela vous intéresse ! –NDLR-).
Bref, la marche était petite pour fournir des fûts de calvados pour vieillir du whisky.
Ainsi, je comprends mieux pourquoi, dans son souhait de produire des whiskies 100 % français d’exception, la société Les Bienheureux (qui produit la gamme BELLEVOYE) a choisi de faire vieillir un de ses assemblages dans des fûts de Calvados.
Voici donc quelques (ils sont rares et donc chers) ex-fûts de très vieux calvados qui partent en direction de la Charente pour héberger quelques années une création BELLEVOYE : Le VERT aller tout doucement voir le jour.
Pour parfaire le tout (et faire plaisir à un amateur de whisky tourbé comme PEATDREAM –mais je ne suis pas certain que ce soit la vraie origine), il a été décidé d’y mettre une pointe de distillat tourbé (toujours sur la base d’une triple provenance comme pour les whiskies BELLEVOYE).
Alors voilà le décor posé, et ça donne quoi ?
Déjà le liquide qui coule dans le verre à une couleur proche de celle d’un calvados : un marron bien marqué avec des reflets cuivrés. Cette dernière lui vient de son premier vieillissement en fût de chêne pendant 3 à 5 ans dans les distilleries qui l’ont produit puis du finish de quelques mois, une fois assemblé, dans des fûts de très vieux Calvados (ayant contenu ce distillat de pomme pendant 40 ans).
Quand on approche le nez il s’attend à aller vers un sherry très légèrement tourbé !
Quand le nez plonge franchement dans le verre, il va détecter donc une très légère tourbe. Il va également et surtout détecter des notes chaudes et poivrées (qui donnent l’impression d’un whisky plus fort que les 43 % d’alc annoncés). Il va enfin détecter des notes sucrées.
Au retour dans le verre, le nez détecte beaucoup plus de pomme bien mure piquée de bâtons de cannelle et caramélisée.
Attention nous ne sommes pas en face d’un calvados et le souvenir de l’ancien distillat du fût de finish n’est pas marqué et se traduit par une sucrosité accrue et une présence soutenue d’épices (ne vous attendez pas à y sentir de la pomme franche comme dans un calvados). En revanche, le finish rend le distillat moelleux. Personnellement je dirai qu’on s’approche d’un vieillissement sherry mais à la française ! L’ambiance reste beaucoup plus chaude qu’un calvados (en tout bien tout honneur).
Vous n’avez pas détecté la tourbe ? Mettez-en un peu dans la pomme de votre main et elle ressortira sous la forme de l’odeur du tabac froid.
Dès qu’il rentre en bouche, ce triple malt est clairement moelleux, et doux. Mais cela ne dure pas, des graines de poivre arrivent ensuite et viennent vous piquer la langue. Elles s’estompent un instant pour laisser la part belle aux fruits compotés. Un instant on détecte une furtive amertume. C’est sur la fin de la dégustation que l’on ressent une pointe de fumée et une texture mielleuse (alors que les épices viennent titiller à nouveau votre langue). Sur la fin si vous avez encore une once de courage vous aurez un vague souvenir de calvados, mais c’est le signe de la fin de la dégustation.
La finale est assez longue et sera boisée et épicée. Sur la durée la finale va s’ioder et vous rafraichir.
Je sais qu’il ne va pas être facile de le trouver (car seulement en version 20 cl dans un coffret cadeau noir de chez BELLEVOYE) mais je trouve qu’il mérite clairement une petite dégustation car il sait se faire atypique et toujours 100 % français !
A l’instar des propriétaires de la société Les Bienheureux, je vais poursuivre mon voyage confiné en France en allant vers les sud à la découverte d’autres distilleries. Je suis certain que m’a route croisera à nouveau celle du whisky de l’Élysée sur des notes plus NOIR (mais je vous le dirai).